Attentes consommateurs : les nouvelles règles du jeu pour regagner leur confiance
L’accélération digitale accentuée par la crise sanitaire a définitivement transformé les business model. Cependant les derniers chiffres de l’ACSEL viennent temporiser la réussite insolente du e-commerce. D’après le baromètre annuel sur la confiance des Français envers le web, l’ACSEL observe une stagnation de la confiance. En 2022, la confiance globale des consommateurs à l’égard d’internet n’a gagné qu’un seul point, alors qu’elle avait bondi de 5% entre 2019 et 2020. Chez les 65 ans et plus, la confiance envers internet est même en recul : -8 points par rapport à 2021. Des chiffres plutôt surprenants quand on se souvient que la FEVAD constatait une forte progression des ventes en ligne l’année dernière. En 2021, les Français ont dépensé 129 milliards d’euros sur internet. Soit une progression de 15,1% par rapport à 2020. Et pourtant oui, les deux organismes évoquent bien les mêmes consommateurs !
Comment expliquer le paradoxe entre l’engouement des Français pour la consommation en ligne et leur défiance envers internet. Comment regagner la confiance des consommateurs ? Regards croisés de l’ACSEL et de la FEVAD pour prendre le pouls des tendances de consommation au lendemain du boost du commerce en ligne. Ces tendances renforcent-elles ce paradoxe ou font-elles émerger d’autres initiatives ?
Le e-commerce responsable
L’essor du e-commerce depuis la crise sanitaire a eu une conséquence prévisible : le nombre d’acteurs sur le marché de la vente en ligne est en progression. La FEVAD constate que le nombre de sites e-commerce a augmenté de 11% en un an. La compétitivité est donc plus forte que jamais pour être choisi par les consommateurs. Pourtant, le classement de la FEVAD montre que les ventes en ligne sont essentiellement captées par les marketplaces. Dans le top 5 des sites e-commerce les plus visités en France en 2021, on retrouve en effet : Amazon, Leboncoin, Cdiscount, la Fnac et Vinted.
Comment expliquer l’hégémonie des marketplaces dans l’écosystème e-commerce ? Leur grande notoriété est-elle un facteur de confiance ? On peut le supposer. Dans ce contexte, il est difficile pour les autres sites de se démarquer et de capter de nouveaux clients. Pour consolider la confiance entre sites et consommateurs, le baromètre de l’ACSEL propose une piste : la mise en place d’un cyber-score « Yuka de la confiance numérique ». Une idée qui séduit 78% des Français qui seraient rassurés dans leurs activités en ligne grâce à ce badge numérique.
Jouer la carte de la proximité semble aussi être un moyen efficace de séduire les consommateurs. De nouvelles plateformes alternatives émergent : enbasdemarue.fr ou Aisne Shopping. Ces nouveaux acteurs font le pari du marché de niche pour répondre à une demande différente, surfant sur la consommation locale et une relation de proximité avec les vendeurs et les services.
La seconde main et la consommation durable au cœur des préoccupations clients
Le top 5 des sites de la FEVAD met aussi en lumière des e-commerçants très engagés dans la vente de produits d’occasion et d’articles reconditionnés. Vinted, plateforme spécialisée dans la seconde main, en est une belle illustration.
Ce positionnement répond à une tendance identifiée par l’ACSEL : 80% des cyberacheteurs ont déjà acheté ou revendu des produits d’occasion en ligne. La capacité des acteurs du web à anticiper et à intégrer cette tendance de consommation responsable semble donc être un facteur déterminant pour renforcer la confiance des consommateurs, vecteur de conquête et de fidélisation. Rakuten l’a bien compris. Sur son site, les clients qui revendent leurs articles cagnottent des points utilisables pour de futurs achats.
Et la tendance digitale finit par essaimer dans le physique. La marque Petit Bateau avait testé la vente d’articles de seconde main sur son site web dès 2017. En novembre 2021, le dispositif est déployé dans une sélection de ses boutiques physiques. Fort du succès rencontré par ses corners de seconde main, Petit Bateau est allé plus loin. En février 2022, elle a inauguré sa première boutique de 400m2 dédiée à la seconde main près de Troyes. Et depuis le 26 avril 2022, la marque dispose aussi d’un espace dédié aux vêtements d’occasion au sein des Galeries Lafayette Haussmann.
Live shopping : un levier interactif en quête de modèle
Le retour en grâce du « téléachat 2.0 » n’a pas manqué de susciter l’enthousiasme des marques. En pleine période de distanciation sociale, ce levier a remis l’humain au cœur de la relation client. Moins anonyme que le e-commerce, plus interactif, plus ludique aussi, le live shopping est un support qui ne manque pas d’attrait. Une alternative où l’authenticité peut servir la reconquête de la confiance.
L’enseigne de vêtements Morgan en a fait la preuve avec son premier live shopping, le 3 avril dernier. Morgan présentait sa première session pour le lancement d’une collection capsule réalisée en collaboration avec Iris Mittenaere. L’ancienne miss Univers était co-présentatrice de la session, accompagnée pour l’occasion d’une influence d’Instagram. La collection était présentée en avant-première, et les clients ont pu poser des questions à Iris Mittenaere pour découvrir les coulisses de sa collaboration avec Morgan. Une transparence et une proximité sur-mesure pour séduire les clientes.
Le 14 avril dernier, l’IAB France a publié sa toute première cartographie des principaux acteurs du live shopping en France. L’organisme reconnait un retard des acteurs tricolores en la matière, mais il souligne aussi que la tendance est bien là, et qu’elle bénéficie d’un fort développement grâce à de nombreux acteurs clés (Veepee, Cdiscount, Carrefour, Fnac-Darty…). En 2021, la FEVAD a constaté que seulement 12% des clients web avaient déjà participé à une session de live shopping. Mais si la tendance annoncée par l’IAB France se concrétise, le chiffre pourrait rapidement évoluer à la hausse.
Cryptomonnaies et metaverse : un engouement à nuancer
La crise sanitaire et la digitalisation à marche forcée des marques a rebattu les cartes en matière d’usages numériques. Marc Lolivier, le secrétaire général de la FEVAD le confirme : « En deux ans, on a gagné presque cinq ans, cela notamment grâce aux magasins qui ont beaucoup investi dans le digital et qui ont pris de l’avance sur leur feuille de route digitale. »
La seconde main et le quick commerce profitent de cet élan. Mais sur les autres sujets, tels que le metaverse et les cryptomonnaies, les acteurs français restent encore frileux. Pourtant, l’intérêt des consommateurs s’affirme. La preuve avec les chiffres de l’ACSEL : 30% des Français envisagent l’utilisation de cryptomonnaies ; 38% souhaitent évoluer dans le metaverse.
Et l’abandon des cookies ?
L’abandon des cookies dans le cadre du RGPD a provoqué un vent de panique du côté des marques. Pourtant, les consommateurs français semblent satisfaits de cette limitation des cookies. Ils sont 59% à estimer que le paramétrage des cookies leur garantit une meilleure protection de leurs données.
Malgré l’impopularité de cette mesure auprès des marques, il semble donc que les consommateurs aient confiance en cette nouvelle façon de naviguer. Quelle leçon en tirer pour les marques ? Que les clients sont vraiment très sensibles à ce sujet et que la protection des données doit donc être un sujet prioritaire dans leur stratégie de réassurance. D’ailleurs, la suppression des cookies fait naître de nouvelles attentes chez les consommateurs. Le baromètre de l’ACSEL souligne qu’ils sont 72% à trouver les nouveaux paramétrages de cookies trop compliqués. Le chiffre ne devrait pas manquer d’intéresser les marques soucieuses d’offrir une navigation plus fluide à leurs clients.