ITW Laurent Bataille – Faire du numérique et de l’électricité des leviers du développement durable – Et si j’étais Président ?
Place aujourd’hui à Laurent Bataille, Président de Schneider Electric France pour cette 11ème interview de la série “Et si j’étais Président”. Une série réalisée par MC Factory en partenariat avec Stratégies. Laurent Bataille partage sa vision d’une France plus engagée et responsable.
10 questions posées à Laurent Bataille, candidat à la présidentielle 2022
Votre programme
1 – Quels seraient les deux axes majeurs de votre programme ?
Mes 2 axes seraient la décarbonation au travers de l’électrification, et l’accélération de l’industrialisation avec du digital.
Pour ce qui concerne la décarbonation, il s’agit aujourd’hui d’accélérer la Stratégie nationale bas carbone de la France. Or, l’une des façons d’atteindre le « net zero » en 2050, c’est en grande partie d’électrifier l’économie de notre pays. Nous devons passer d’une part d’utilisation de l’électrique de 25% à 55 puis 60%. Pourquoi ? Parce que l’électricité, en France est déjà décarbonée à 90%, ce qui est une grande force. Cela passera par la transformation de quelques grands usages comme les transports qui seront de plus en plus électriques alors que 97% sont encore thermiques. Aussi, le chauffage (60% de fioul dans les bâtiments tertiaires). Ou encore l’industrie qui fonctionne encore beaucoup avec des processus carbonés…
Le second axe, c’est l’industrie. Nous avons en effet une opportunité assez incroyable de la développer pour la rendre plus compétitive, efficace et résiliente en tirant parti des technologies digitales. C’est un vrai levier d’économies de ressources et d’énergie, qui permet aussi d’améliorer les procédés industriels. Pour que l’industrie en France réussisse, il faut se battre sur des aspects de qualité des produits, de sobriété d’utilisation de la ressource, etc. Et de ce point de vue, le digital permet d’assurer la meilleure production à la sortie des usines.
Par exemple, les usines de batteries de véhicules électriques en France essaient de repousser les limites du procédé de fabrication de façon à ce qu’il y ait moins de rebus. C’est une véritable valeur ajoutée. D’autres opportunités aussi sont en train d’émerger. Dans l’hydrogène, dans la fabrication de batteries de stockage… Et c’est en les équipant des meilleures technologies que l’on pourra continuer de développer ces nouvelles filières.
2 – Quel serait votre projet pour renforcer le rôle sociétal des entreprises françaises ?
Les entreprises doivent s’engager dans la formation professionnelle des jeunes. En particulier au travers de l’apprentissage et des stages. Nous avons une très longue tradition sur le sujet chez Schneider et en France, à fin 2021, nous avions plus de 1000 jeunes alternants sous contrat, soit plus de 7 % de nos effectifs. C’est pour nous une source de fierté, mais c’est également source d’une excellente dynamique et de diversité dans les équipes. Mon projet serait donc de porter ce sujet, tout en insistant sur le rôle de l’apprentissage dans l’inclusion. Pour moi c’est une valeur majeure de l’entreprise, elle fait partie de la société, elle contribue à son écosystème…
3 – Pourquoi faut-il voter pour Laurent Bataille ?
Parce que je suis entièrement focalisé sur les défis de notre siècle : trouver des solutions face au changement climatique. Il s’agit effectivement de l’enjeu majeur des années à venir, qui conditionnera les conditions de vie des générations futures. Et c’est aujourd’hui que nous devons agir. Nous sommes la première génération à savoir et pouvoir le faire. Le temps presse, tout va se jouer dans la prochaine décennie.
4 – Quelle personnalité publique choisiriez-vous pour être votre Premier Ministre ?
Il s’agirait de quelqu’un qui a un sens de l’intérêt général, de la détermination, du courage. Avec une vraie capacité à travailler collectivement, parce que rien ne se fait à grande échelle sans travail collectif… Et pour moi, celui qui correspond le mieux à ce profil est Paul-Louis Merlin. Il est le principal fondateur de Merlin-Gérin, marque historique de Schneider Electric.
Cet homme, qui était chargé de contrôler une centrale électrique à ses débuts, a fini par dompter l’arc électrique. Il a su s’entourer, il était audacieux et enthousiaste. Et il a finalement créé une entreprise qui est devenue leader dans la distribution d’électricité ! Par ailleurs, il avait un vrai sens de l’humain. Il avait tout le temps le souci de la formation. C’est pourquoi il a d’ailleurs créé une école à son nom dans laquelle sont enseignés aujourd’hui les métiers de l’électricité du futur et qui est l’Ecole Schneider Electric. Un mixte de qualités qui, je pense, ferait un excellent Premier Ministre.
Avant de quitter votre poste actuel
5 – Quels sont les engagements RSE / ESG pris par votre direction actuelle ?
Nous pensons que la technologie nous permet de réconcilier le progrès. Et en particulier le progrès économique et social, et la durabilité. L’énergie est source de vie. Dans tout ce que l’on fait, dans tout ce que l’on utilise, on a besoin d’énergie. S’assurer d’un développement durable qui mette une énergie décarbonnée à disposition de nos sociétés, c’est absolument majeur.
Scheider Electric construit sa vision sur le sujet depuis plus de 15 ans. Ce qui lui a permis de mûrir et d’élargir le spectre de ses engagements. Aujourd’hui, nous avons 11 engagements globaux, qui se déclinent localement, sur cinq thèmes clés.
- D’abord, le climat : à savoir aider nos clients à limiter leurs émissions de CO2 grâce à nos technologies.
- Ensuite, les ressources, c’est-à-dire en utiliser le moins possible et avoir recours à des ressources plus propres pour la planète. Exemple, nous cherchons à bannir les plastiques à usage unique dans tous nos packagings et à utiliser du carton recyclable.
- Notre 3ème grand thème est la confiance. Nous nous assurons que nous fonctionnons dans un écosystème où les gens se comportent bien en termes social. Par exemple, nous favorisons beaucoup l’inclusion en réalisant en priorité nos achats auprès des fournisseurs qui emploient des gens soit en réinsertion, soit en situation de handicap.
- Le 4ème grand thème c’est l’égalité. L’un de nos objectifs en la matière est de permettre à 50 millions de personnes, qui n’ont pas accès à l’électricité, d’accéder à l’électricité verte. C’est ce que nous faisons par exemple en Afrique avec le développement de projets solaires.
- Enfin notre dernier thème est celui des générations. Pour Schneider Electric France, j’ai pris l’engagement de former près de 1000 étudiants au sein de notre école d’ici 2023.
6 – Quelles seraient les principales missions de votre successeur au sein de votre entreprise pour accélérer ces engagements ?
Ce serait de développer l’économie circulaire. Pourquoi ? Parce que nous avons lancé depuis 2 ans des initiatives de réutilisation, de redistribution, de réparation sur certains produits, identifiables grâce au label « Circular Certified ». Mais je pense que nous n’en sommes qu’au début et qu’il y a des possibilités incroyables de développer cette activité.
7 – Comment doit évoluer votre métier pour être plus responsable ?
Pour que notre métier ait un impact à plus grande échelle, nous devons mieux accompagner nos clients et nos fournisseurs dans leur transformation vers le développement durable. C’est qui démultipliera les initiatives.
Nous avons deux exemples très concrets en la matière. D’abord, nous avons récemment créé pour nos clients un métier de conseil en développement durable. Nous avons en effet appris dans nos usines à utiliser moins d’énergie, moins de ressources, à calculer notre empreinte carbone. Et c’est une compétence que nous mettons à la disposition de notre écosystème. Ensuite, pour vraiment faire bouger les lignes, nous avons demandé à nos 1 000 fournisseurs de s’engager à diviser par deux leurs émissions de carbone avec nous d’ici 2025. Et nous les aidons à se mettre sur la bonne trajectoire en leur apportant de la technologie et du conseil. Tout cela permet d’envisager les choses à plus grande échelle.
Pour intégrer l’Elysée
8 – Que demanderiez-vous au Président sortant, Emmanuel Macron, avant qu’il quitte l’Elysée ?
Je lui demanderais ce qu’il a retenu des deux années de crise que nous venons de traverser avec le COVID. Parce que je pense que c’est une période relativement inédite que l’on a tous vécu différemment. Il serait intéressant d’avoir sa vision de dirigeant sur le sujet. Durant cette période, beaucoup d’entreprises et d’organisations ont prouvé leur résilience, et ont fait appel à des ressorts assez incroyables en termes de participation collaborative, etc. Cela a été une période de transformations, de défis, et j’aimerais recueillir sa perspective pour savoir quels impacts tout cela a pu avoir à l’échelle du pays.
9 – Quel serait le premier engagement de Laurent Bataille, pris à l’Elysée ?
Je m’attaquerais à la dépense énergétique au travers d’un programme de rénovation. Pour rénover, à très grande échelle, des bâtiments en déployant des technologies qui permettent d’économiser de l’énergie. Comme, par exemple, la régulation du chauffage via des systèmes de thermostats intelligents. Cela permettrait je pense de réconcilier des aspects de développement durable et de pouvoir d’achat.
10 – Quel objet personnel ramèneriez-vous avec vous à l’Elysée ?
Des peintures ! C’est pour moi un art qui permet l’évasion, l’imagination et la créativité. Et je pense que dans un environnement pareil il faut parfois s’aérer. C’est source d’équilibre.
A propos de Laurent Bataille
Laurent Bataille est Président de Schneider Electric France et membre du comité exécutif de Schneider Electric. Il rejoint Schneider Electric en 2004 au sein de la Direction de la Stratégie et des Acquisitions. Il occupe différents postes à responsabilités dans la division industrielle CST de 2006 à 2011 avant de mener l’activité Solaire de Schneider Electric de 2011 à 2014. En 2014, il prend la tête de la division EcoBuilding avant d’être nommé Directeur général Digital Energy en janvier 2019. Laurent était auparavant consultant pour McKinsey & Company.
Laurent est titulaire d’un MBA de l’INSEAD et d’un Master en Mathématiques Appliquées de l’Ecole Polytechnique (France).
Un grand merci à Ambre Delage pour sa précieuse contribution.